Dernière mise à jour à 12h12 le 29/04
Des scientifiques allemands et russes prélèvent des échantillons dans la grotte de Denisova, en Russie. Photo : Serguei Zelensky / Académie des sciences de Russie. |
En passant au crible des cuillères à café d'argile et de sable gratté sur le plancher de grottes, des chercheurs allemands ont réussi à isoler de l'ADN humain ancien, et cela sans avoir à toucher un seul os. Leur nouvelle technique, décrite dans une étude publiée jeudi dans la revue Science, promet d'ouvrir de nouvelles voies de recherche sur la préhistoire humaine et a été accueillie avec enthousiasme par les généticiens et les archéologues. ? C'est un peu comme découvrir que vous pouvez extraire de la poussière d'or de l'air ?, a déclaré Adam Siepel, un généticien de la population au Cold Spring Harbor Laboratory. ? Un document absolument incroyable et excitant ?, a ajouté David Reich, professeur de génétique à Harvard, qui se consacre à l'étude de l'ADN ancien.
Jusqu'à récemment, la seule fa?on d'étudier les gènes des anciens humains comme l'homme de Neandertal et leurs cousins, les hominidés de Denisova, était de récupérer l'ADN d'os fossiles. Mais ils sont rares et difficiles à trouver, ce qui a grandement limité la recherche sur où les premiers humains ont vécu et l'ampleur de leur présence. Les seuls os et dents d'hominidés de Denisova que les scientifiques possèdent, par exemple, proviennent d'une seule grotte en Sibérie. La recherche de ces panneaux indicateurs génétiques dans les sédiments n'est devenue possible que ces dernières années, avec l'évolution récente de la technologie, y compris le séquen?age rapide de l'ADN.
Bien que l'ADN colle aux minéraux et aux plantes décomposées dans le sol, les scientifiques ne savaient pas s’il ne serait jamais possible de retrouver des fragments de gènes qui ont des dizaines de milliers d'années et profondément enfouis parmi d'autres débris génétiques. Les fragments de gènes de l'homme de la préhistoire représentent une fraction infime de l'ADN se trouvant dans le monde naturel. Mais les scientifiques allemands, dirigée par Matthias Meyer à l'Institut Max Planck de biologie du développement à Tübingen, ont passé des années à développer des méthodes pour trouver l'ADN même où il semblait incroyablement rare et dégradé.
Mais la recherche et l'analyse de l'ADN ancien dans de la poussière est beaucoup plus difficile que de l'obtenir à partir d'os, si petits soient-ils. L'idée n'était cependant pas nouvelle, a noté Viviane Slon, membre du groupe du Dr Meyer et le premier auteur du nouveau document. D'autres groupes de chercheurs ont découvert de l'ADN dans des sédiments, comme le Dr Poinar et Michael Hofreiter, son ancien élève. En utilisant une cuillère à soupe de terre d'une grotte du Colorado, son équipe a découvert des traces de 16 espèces animales qui y ont vécu. Il a fallu deux semaines pour le faire, en passant au crible pas moins de 2 tonnes de terre. Mais les scientifiques allemands sont allés plus vite et beaucoup plus loin grace à l'évolution de la technique.
Pour les chercheurs allemands, le nombre de fragments d'ADN par échantillon provenant de l'homme antique était minuscule et variait de 0 à 8822, selon le site de la grotte. La découverte qu'il est maintenant possible de faire tout cela, a souligné le Dr Reich, est une ? chose incroyable, étonnante ? et posent des questions qui peuvent être désormais presque infinies. Une autre application de la découverte, a déclaré le Dr Reich, consisterait par exemple de commencer à chercher des preuves de l'ADN humain ancien dans des sites en plein air, au lieu de le chercher dans des os dans des grottes. ? Si cela fonctionnait, cela fournirait une image beaucoup plus riche des schémas de répartition géographique et de migration de l'homme antique, une image non limitée par le petit nombre d'os qui ont été trouvés ?, a-t-il dit. ? Ce serait une chose magique à faire. ?