Dernière mise à jour à 15h45 le 12/06
Deux ans après que la Chine ait ouvert un méga-tunnel de 80 milliards de Dollars US pour transférer l'eau du Sud du pays vers son Nord desséché, ce projet a réussi à étancher la soif de 100 millions de personnes -à peu près la population combinée de l'Allemagne et des Pays-Bas- atténuant une alarmante crise de l'eau et récoltant de riches dividendes économiques dans 18 villes industrielles et agricoles chinoises majeures et la capitale, Beijing.
Le réseau de canaux et de tunnels de 4 350 kilomètres, soit presque la distance entre les deux c?tes des Etats-Unis, a surmonté des difficultés d'évacuation des eaux usées quasi-impossibles pour canaliser l'eau propre le long de la route. Dans la ligne Est seulement, 426 plans co?teux de nettoyage ont été mis en ?uvre pour réduire 85% des polluants d'entrer dans le flux : les fosses d'infiltration et les bassins fluviaux contaminés ont été filtrés ; des zones humides artificielles créées ; les flux contaminés ont été coupés ; les usines de papier, les usines chimiques et les pollueurs plus lourds ont été fermés ou rénovés ; enfin, 510 projets prévus impliquant des investissements de 3 milliards de Dollars ont été contournés aux fins de la lutte contre la pollution.
Le 9 juin, le Comité de construction du projet de dérivation d'eau Sud-Nord a communiqué des chiffres importants concernant l'achèvement de ce projet massif.
Depuis sa mise en service à la fin de 2014, la ligne centrale a transporté 8 milliards de mètres cubes d'eau du Yangtsé, dans le Sud de la Chine, à Beijing, le centre politique du pays avec une population de 21,5 millions, mais avec une quantité moyenne d'eau par habitant de 150 m3, soit 1/14e de la moyenne nationale et 1/50e de la moyenne mondiale ; aujourd'hui, 73% de l'eau du robinet dans les zones urbaines provient du transit ; la Province du Hebei, un gigantesque consommateur d'eau du fait de sa production d'acier brut, 1/5e de la Chine et 1/10e du monde ; la Province du Henan, l'un des deux principaux producteurs de céréales de Chine depuis 2000, avec une énorme production de 59 millions de tonnes en 2016 ; Tianjin, la seule zone de libre-échange du nord de la Chine et un p?le de fabrication de haute technologie.
La Province du Shandong, le deuxième producteur de blé de Chine et la troisième province la plus polluée (1/6e de la moyenne nationale d'eau par habitant), a quant à elle re?u 1,99 milliard de mètres cubes d'eau de la ligne Est, bénéficiant à 40 millions de personnes.
Des mesures environnementales strictes garantissent la qualité de l'eau, car toutes les eaux détournées répondent en toute sécurité au Niveau III -la norme minimale pour l'eau potable, également utilisable dans les zones de reproduction aquatique. L'eau de la ligne centrale répond aux normes de la classe II, avec des échantillons s'approchant même du Niveau I, le niveau le plus propre, considéré comme s?r pour les réserves naturelles. Et à Beijing, selon le groupe d'aqueduc de Beijing, la dureté de l'eau est passée de 380 à 120 milligrammes par litre depuis que l'eau ? importée ? a commencé à circuler.
Les effets sur la nature ont également été incroyables. Le transit d'eau a ainsi évité l'exploitation de plus de 800 millions de mètres cubes d'eaux souterraines dans le Nord déjà épuisé ; en outre, à mesure que les eaux de surface sont filtrées dans le sol, les niveaux d'eau souterraine dans les zones surpeuplées de Beijing, du Henan et du Shandong ont augmenté. En 2016, pour la première fois depuis des décennies, le niveau d'eau souterraine de Beijing a rebondi de 0,52 mètre. La même année, le Shandong a détourné 145 millions de mètres cubes du système pour recharger ses quatre lacs, ce qui a permis d'alimenter efficacement un écosystème vulnérable.
En réponse aux préoccupations environnementales concernant l'origine de la partie centrale du projet, le Réservoir de Danjiangkou, le gouvernement central a accordé le 22 mars un paquet de 3 milliards de Dollars US pour l'assainissement écologique, planifiant un système co?teux de gestion des eaux usées en plus d'un contr?le des risques écologiques et de préservation de l'eau et du sol.
La construction a débuté en 2002 et nécessitera entre 40 et 50 ans. Ce projet est le plus grand projet de transfert d'eau au monde, sans précédent en termes de volume d'eau à transférer, de distance à parcourir et de population à couvrir -pas moins de 438 millions de résidents répartis sur 15% du territoire chinois.
Le projet comporte trois sections : une ligne Est de 1 467 kilomètres, qui s'étend du fleuve Yangtsé inférieur à Tianjin ; la ligne médiane, de Danjiangkou à Beijing ; et une ligne Ouest, qui pourrait un jour relier les sources des fleuves Yangtsé et Jaune à travers le plateau de haute altitude Qinghai-Tibet. La ligne Ouest reste cependant pour l'heure largement un projet.