Dernière mise à jour à 08h10 le 27/07
Avec le 10e sommet des BRICS qui s'est ouvert mercredi en Afrique du Sud, le bloc des économies émergentes inaugure un nouveau chapitre dans l'histoire de sa coopération tous azimuts au terme d'une première décennie fructueuse.
Lors de ce rendez-vous du 25 au 27 juillet à Johannesburg, les dirigeants du Brésil, de la Russie, de l'Inde, de la Chine et de l'Afrique du Sud vont unir leurs efforts pour promouvoir davantage encore un développement commun dans une conjoncture internationale changeante.
En outre, dans la foulée des résultats du dernier sommet des BRICS de septembre dernier à Xiamen (sud-est de la Chine), les pays membres vont chercher à trouver les moyens de garantir que leur propre croissance profitera à d'autres pays en développement.
UNE COOPERATION APPRECIABLE
Au cours de la décennie écoulée, les BRICS ont coopéré de fa?on substantielle dans toute une série de domaines, donnant au bloc des bases solides pour jouer un r?le plus grand sur la scène internationale, notamment dans le cadre des efforts internationaux pour gérer le changement climatique et promouvoir un développement durable.
La Nouvelle banque de développement (NBD), le bras financier des BRICS, en offre un aper?u. Depuis son lancement en juillet 2015, cet établissement basé à Shanghai a approuvé 21 projets totalisant 5,1 milliards de dollars.
Cette année, la NBD va ouvrir son antenne sur le continent américain à Sao Paulo, la capitale économique du Brésil, tandis que son antenne africaine basée à Johannesburg a commencé à fonctionner en 2017. Cette implantation au Brésil va élargir et faciliter les services financiers qu'elle offre, en faisant d'elle un acteur majeur de la coopération Sud-Sud.
La NBD va se concentrer tout particulièrement sur les infrastructures et le développement durable. Elle a ainsi financé quatre projets d'énergie durable en 2016 dans le cadre de ses premiers prêts destinés à réduire les émissions de CO2.
Par de telles décisions, la banque aide les membres des BRICS à honorer leurs engagements envers l'Accord de Paris sur le changement climatique et l'Agenda 2030 de l'ONU pour le développement durable, à promouvoir un développement commun et à batir leur leadership dans la coopération Sud-Sud.
Parallèlement, les BRICS n'ont cessé ces dernières années d'accro?tre les liens entre leurs peuples, que ce soit par des expositions, des festivals de cinéma ou encore des programmes éducatifs, en vue de stimuler la compréhension et la confiance entre les Etats membres et de consolider son socle de partenariats plus étroits.
Ils ont aussi créé des mécanismes de consultation à différents niveaux et dans différents domaines, cherchant à parler d'une seule et forte voix sur les questions régionales et internationales d'intérêt commun.
Les BRICS illustrent comment des pays du Sud peuvent travailler ensemble de fa?on productive, estime Yazini April, chercheuse au Conseil de recherche en sciences humaines (HSRC) en Afrique du Sud.
UNE GOUVERNANCE AMELIOREE
"Les BRICS ont érigé une nouvelle scène pour les économies émergentes, ce dont on avait besoin", dit-elle.
Un sentiment partagé par Reginah Mhaule, la ministre sud-africaine déléguée aux Relations internationales et à la Coopération. "Ces pays sont unis par une volonté forte de changer le système international avec l'ambition de refléter la diversité des puissances mondiales, des économies, des cultures et des sociétés en général", avait-elle confié lors d'un séminaire organisé en juin dernier.
"Nous sommes tous d'accord sur le fait que c'est une force avec laquelle il faut compter sur la scène internationale et qui a contribué à une plus grande ventilation de la puissance économique et politique dans le monde", a ajouté Mme Mhaule.
Les BRICS sont aussi devenus une force non négligeable en matière de protection de la justice et de l'équité dans le monde.
Ainsi, ses membres ont aidé à accro?tre ces dernières la représentativité des pays émergents au sein du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, faisant de ce bloc -qui représente environ 40% de la population de la planète et un quart de l'économie mondiale- un accélérateur en matière de réforme du système de gouvernance économique globale.
"Bien positionnés, les BRICS pourront faciliter l'émergence continue des plus grands pays émergents en vue de participer pleinement à un nouveau type de gouvernance mondiale, dont l'humanité a grandement besoin au XXIe siècle", avait un jour noté Robert Lawrence Kuhn, président de la Fondation Kuhn et expert de longue date de la Chine.
Aux yeux de Richard Levin, directeur de l'Ecole nationale d'administration (NSG) d'Afrique du Sud, les BRICS peuvent améliorer cette gouvernance mondiale en réduisant simplement la pauvreté, l'une des priorités de l'Agenda 2030 de l'ONU.
"C'est l'un des instruments les plus importants pour combattre la pauvreté. Les BRICS veulent jouer un r?le dans la transformation de la gouvernance non pas pour la transformation elle-même, mais pour les populations", résume-t-il.
GERER DE NOUVEAUX DEFIS
Réunis en juin dernier à Pretoria, la capitale sud-africaine, les chefs de la diplomatie des BRICS ont lancé un appel en faveur de la préservation du multilatéralisme et d'un ordre mondial s'appuyant sur des règles.
Dans un communiqué conjoint, ils ont "réaffirmé la centralité" des Nations Unies, de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et du droit international. Ils ont aussi souhaité une plus grande voix au chapitre pour les économies en développement et émergentes dans les processus de décision, notamment en matière de gouvernance économique, afin de mieux refléter le paysage international.
Les ministres ont aussi apporté leur soutien à "une économie mondiale ouverte et inclusive qui permette à tous les pays et à leurs peuples de partager les fruits de la mondialisation, "avec un engagement ferme envers le libre-échange et un système commercial multilatéral reposant sur des règles".
Les Etats membres des BRICS, en particulier, ont affiché leur opposition à "la nouvelle vague de protectionnisme et à l'impact systémique de mesures unilatérales qui sont incompatibles avec les règles de l'OMC". Et de souligner le r?le que doit jouer l'OMC pour "renforcer la sécurité et la prévisibilité dans le commerce international".
A l'aube de cette deuxième décennie de coopération au sein des BRICS, et comme l'a souligné le président chinois Xi Jinping, si les cinq pays membres veulent gagner de la force, ils doivent travailler ensemble tels les doigts d'une main pour former un poing capable d'être percutant.
En quête d'une croissance commune face à de nouveaux défis, la Chine a exhorté les autres membres des BRICS à trouver de nouveaux moteurs de croissance, tout en coordonnant leurs politiques macroéconomiques, et à accro?tre leurs échanges culturels et entre peuples afin de renforcer le socle de la solidarité et de la coordination du bloc.
Chen Fengying, chercheuse à l'Institut chinois des relations internationales contemporaines, pense elle aussi que renforcer les échanges entre peuples et entre think tanks aidera les BRICS à promouvoir ensemble une réforme de la gouvernance mondiale et à faire face à l'unilatéralisme commercial.
Sur la coopération en matière de sécurité, outre la lutte contre le terrorisme et l'extrémisme, l'experte chinoise propose que les BRICS étendent leur coopération vers des secteurs tels l'internet, l'énergie et la finance.
Notant que le fléau du développement mondial déséquilibré pèse toujours sur la croissance mondiale, Mme Chen souligne le besoin d'une coopération économique accrue entre les pays en développement et émergents dans des domaines comme le financement, le commerce électronique, la protection des droits de propriété intellectuelle et la facilitation des investissements.
"C'est exactement en quoi une plateforme telle que les BRICS peut jouer un meilleur r?le", selon elle, ajoutant : "Si elle se développe bien, elle peut prendre la tête de la coopération Sud-Sud afin que davantage de pays en bénéficient".