Dernière mise à jour à 09h12 le 24/11
Alors que le Parlement européen, réuni en session plénière à Strasbourg, a voté cette semaine deux résolutions en faveur d'une "Europe de la défense", l'eurodéputé britannique Geoffrey van Orden, vice-président du groupe des conservateurs réformistes, livre, dans un entretien avec Xinhua, sa conception de la politique de défense, plaide pour une collaboration étroite avec l'OTAN, et critique les orientations prises par l'UE face à la Turquie et la question migratoire.
Geoffrey van Orden, qui est également président fondateur de "Nouvelle Direction-La fondation pour une réforme européenne" ne mache pas ses mots pour fustiger l'UE. "L'UE n'apprend pas de ses erreurs. Le problème, voyez-vous, c'est que nous avons des idées différentes de ce que signifie le mot nationalisme. A la place de nationalisme, utilisez patriotisme. C'est un bien plus joli mot. En quoi être fier de son propre pays est un problème?!", lache-t-il.
"L'UE a décidé, au nom d'une paix durable en Europe, de se débarrasser du nationalisme, des Etats, des frontières. Et nous voyons bien où cela nous a menés...", poursuit le porte-parole pour les Conservateurs européens sur les questions de défense et de sécurité.
"Je suis fondamentalement en désaccord avec la politique de sécurité et de défense commune (PSDC) et la direction qu'elle prend", déclare sans détour l'ancien officier de l'armée britannique. Avant d'ajouter: "Je pense qu'il est déloyal de la part de l'UE de dire, dans un même souffle, qu'elle ne veut pas dupliquer l'OTAN et que dans le même temps, elle veut une autonomie stratégique. Que diable cela signifie-t-il?!"
Les partisans d'une '"Europe de la défense", dont les Européens parlent depuis des décennies, sont montés au front cette semaine au Parlement européen (PE). Dans une résolution adoptée mardi, le PE a en effet préconisé de consacrer 2% du PIB à la défense et de créer un quartier général européen dans le but d'intensifier la coopération, notamment face au terrorisme.
Mercredi, dans une résolution séparée sur la PSDC, les eurodéputés ont proposé de "réviser radicalement la politique de sécurité et de défense commune et de lancer une opération de formation en Irak pour soutenir les états membres impliqués dans la coalition contre l'état islamique".
"Ces résolutions sont motivées par l'ambition politique de l'UE qui veut jouer un r?le sur la scène mondiale. C'est le motif principal, et non pas une question de moyens militaires", commente l'eurodéputé anglais.
"La PSDC rend l'UE responsable de tout un éventail de réponses aux crises les moins complexes comme les plus difficiles. Elle fait de l'UE la responsable de la défense de pays qui ne sont pas membres de l'OTAN. Comment diable l'UE pourrait-elle s'occuper de la protection de la Finlande, la Suède, l'Autriche, Chypre ou Malte? C'est ridicule et dangereux!", s'emporte Geoffrey van Orden.
"C'est dangereux parce qu'à chaque fois que l'EU parle d'autonomie stratégique, par définition, cela affaiblit l'OTAN et cela encourage ceux qui veulent créer des divisions entre l'Europe et les Etats-Unis. C'est particulièrement dangereux à l'heure où nous avons plus que jamais besoin d'une solidarité et d'un engagement envers l'OTAN", défend le député du Royaume-Uni qui entretient des relations étroites et historiques avec les Etats-Unis et l'OTAN (Organisation du Traité de l'Atlantique Nord).
Interrogé sur les risques d'une politique américaine isolationniste suite à l'élection de Donald Trump à la tête des Etats-Unis, Geoffrey van Orden se veut rassurant. "J'ai toujours pensé que, quel que soit le nouveau président élu, les alliés européens devraient faire plus et contribuer davantage. Après tout, c'est ce qu'ils demandent depuis 50 ans. Nous avons vécu heureux en paix et en sécurité, en délaissant nos propres forces armées. Et maintenant que nous voyons arriver des orages mena?ants, nous ne sommes pas prêts à faire ce qui est nécessaire", déplore-t-il.
"Nous devrions, dans nos pays respectifs, augmenter nos dépenses militaires, renforcer nos capacités et réaffirmer notre alliance avec l'OTAN", affirme le porte-parole pour les Conservateurs européens sur les questions de défense et de sécurité.
Concernant les effets potentiels du Brexit, Geoffrey van Orden répond: "Il n'a jamais été question que la Grande-Bretagne se désolidarise de la sécurité de l'Europe. Nous sommes le pays européen leader de la coopération avec l'OTAN et cela va continuer".
Interrogé sur les modalités de lutte contre le terrorisme, le parlementaire regrette que "l'UE trouve toujours une raison pour dire qu'il faut qu'elle soit plus impliquée en tant qu'institution". "Impliquer l'UE davantage dans ce processus serait une folie! C'est d'abord aux Etats de renforcer les propres structures de sécurité", assène le porte-parole.
"Le Royaume-Uni a de longue date une très bonne coopération avec les alliés européens en matière de renseignements et de contre-terrorisme. Nous avons déjà de bonnes structures concernant l'échange de données. Quand il y a un besoin de coopération bilatérale ou multilatérale en matière de sécurité, nous avons les moyens, nous le faisons tout le temps", argumente-t-il.
Au sujet de la Turquie (membre de l'OTAN), Geoffrey van Orden déplore vivement la ligne choisie par le Parlement européen qui a préconisé cette semaine le "gel" du processus d'adhésion. "Quel signal cela envoie-t-il? Les Turcs vont se sentir jetés hors du club des pays occidentaux. Il ne faudra pas s'étonner s'ils tournent la tête vers d'autres directions. Ce serait une catastrophe pour la sécurité européenne", affirme le parlementaire.
"La Turquie se sent blessée par le manque de sympathie et de soutien des Occidentaux alors qu'elle est en première ligne face au terrorisme et au conflit syrien. Sans parler de la tentative du coup d'Etat du 15 juillet... Elle a accueilli 3 millions de réfugiés pour un co?t de 25 milliards d'euros, estime-t-elle ", poursuit l'eurodéputé avant de clouer au pilori la Chancelière allemande: "Ouvrir les frontières a été une catastrophique stupidité de la part d'Angela Merkel. C'est quelque chose qu'elle n'aurait jamais d? faire. Cela va créer un problème persistant pour l'Allemagne pendant des générations", avance le Britannique.
Interrogé sur la reconnaissance du statut d'économie de marché à la Chine (dont l'échéance est fixée au 11 décembre), Geoffrey van Orden déclare: "Les Etats-Unis et le Royaume-Uni reconnaissent tous deux que la Chine est une grande puissance naissante avec laquelle nous devons parvenir à un arrangement et s'accepter réciproquement. Nous avons besoin d'une relation économique et d'une relation politique dans le respect mutuel".