Dernière mise à jour à 08h47 le 28/06
Des experts en droit international ont fait part dimanche de leurs doutes devant la procédure arbitrale initiée par les Philippines concernant la mer de Chine méridionale.
Une trentaine d'experts originaires d'Asie, d'Afrique, des Etats-Unis et d'Europe ont débattu de cette question lors d'un séminaire co-organisé par le Centre Grotius des études juridiques internationales de l'Université de Leyde (Pays-Bas) et l'Institut d'étude des océans et des frontières de l'Université de Wuhan (Chine).
Ce séminaire a permis de débattre de toute une série de questions liées à la procédure intentée unilatéralement en 2013 par Manille, dont le choix des arbitres, la procédure arbitrale et la juridiction controversée.
Abraham Sofaer, ancien conseiller juridique au Département d'Etat américain, a soutenu la position chinoise. Pour lui, Beijing a clairement fait valoir son droit d'exception prévu à l'article 298 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (CNUDM) lui permettant de ne pas accepter une ou plusieurs des procédures de règlement des différends prévues dans le texte. Aussi, la voie empruntée par les Philippines n'est pas fondée.
Michael Sheng-ti Gau, professeur de droit international à l'Institut du droit de la mer à l'Université nationale océanique de Ta?wan, pense que la plainte philippine peut être rejetée sur la base des notes verbales échangées par les deux parties entre 2009 et 2011.
La Cour permanente d'arbitrage (CPA) de La Haye n'a pas relevé que les revendications de Manille portaient sur des questions de souveraineté, a noté M. Gau, selon qui elle "devrait se préoccuper des vrais problèmes d'admissibilité et de juridiction qui se trouvent dans toutes les revendications philippines".
D'après Sienho Yee, expert en chef à l'Institut du droit international de l'Université de Wuhan, il y a eu d'autres cas d'arbitrages internationaux impliquant des différends territoriaux et frontaliers, mais la cour a ignoré les cas qui auraient pu jouer en faveur de la Chine.
Il a également relevé que deux des cinq arbitres sont revenus sur leurs positions originellement favorables à la Chine, sans explication, ce qui viole le "principe de cohérence" qui est un élément important de la jurisprudence internationale. Ce dernier impose à quiconque d'être cohérent dans ses actes et ses déclarations.
Sreenivasa Rao Pemmaraju, ancien président de la Commission du droit international de l'ONU, a déclaré à Xinhua que quelque soit le résultat de cet arbitrage, il n'aidera en rien à apaiser les tensions dans ces eaux disputées car il ne s'agira que d'un exercice intellectuel sans valeur réelle en matière de résolution des différends.
"Ce sont les gens vivant dans la région qui en souffrent", a-t-il dit. "Et je pense que la Chine fait un bon travail. Elle est aujourd'hui un modèle pour de nombreux pays en terme de discipline, de direction, de dépenses domestiques au profit des infrastructures et du développement économique".
De plus, les experts se sont dits préoccupés par les effets que cette affaire pourrait avoir sur la jurisprudence internationale.
"Le consentement d'un Etat est indispensable, impératif", a relevé Abdul Koroma, ancien juge auprès de la Cour internationale de justice (CIJ). Sans participation chinoise, la juridiction de la CPA est douteuse, selon lui, et dans ce cas, "vous ne pouvez pas discuter des mérites de l'affaire".
M. Sofaer a par ailleurs estimé que la décision de la cour siégeant à La Haye de se saisir de cette affaire "va grandement saper l'utilité potentielle des jugements internationaux".
Les experts ont également appelé la communauté internationale à convenir d'une interprétation correcte, complète et intégrale de la CNUDM, tout en exhortant les parties concernées à résoudre leurs différends au moyen de dialogues concrets et raisonnables.