Dernière mise à jour à 10h45 le 05/10
Le récent sommet entre le président chinois Xi Jinping et son homologue américain Barack Obama a dépassé toutes les attentes concernant la stabilisation des relations sino-américaines, estime Douglas Paal, un expert américain des liens bilatéraux, dans un entretien exclusif à Xinhua.
"Je pense (que ce sommet) a rempli toutes les attentes et qu'elles ont peut-être même été un petit peu dépassées", analyse celui qui est vice-président en charge des études à la Fondation Carnegie pour la paix internationale, un groupe de réflexion basé à Washington.
"L'objectif est de stabiliser les relations sino-américaines, alors que les Etats-Unis entrent une période de politique intérieure d'au moins deux ans qui sera assez houleuse, avec une transition vers une nouvelle administration", rappelle M. Paal.
Une référence à l'élection présidentielle de novembre 2016, alors que la campagne électorale en cours a vu la question des liens sino-américains devenir un sujet de débat br?lant parmi les candidats.
"Et pendant tout cette période, la question des relations avec la Chine sera agitée comme un chiffon rouge par la classe politique, avec toutes sortes de pressions, de déclarations, de faits et de données non vérifiées prononcés lors des campagnes électorales", redoute M. Paal.
"C'est pourquoi nous avons besoin que les dirigeants connaissent plut?t bien les limites de ce qu'ils peuvent faire ou pas. Mais je crois que c'est déjà le cas", selon lui.
Lors de leurs entretiens la semaine dernière, MM. Xi et Obama sont parvenus à une série de consensus et d'accords sur la gestion de leurs différends et sur l'approfondissement de la coopération dans le traitement des défis majeurs tels que la lutte contre le changement climatique et l'aide internationale au développement.
Pour M. Paal, l'accord sur l'ouverture d'un dialogue de haut niveau et l'établissement d'un téléphone rouge sur la cybersécurité, l'une des questions les plus litigieuses entre les deux parties, est un "bonus inattendu". La première réunion du dialogue sur la cybersécurité se tiendra à la fin de cette année et aura ensuite lieu deux fois par an.
A l'avenir, M. Paal s'attend à plus d'interactions entre les deux présidents afin que "les choses restent bien gérées". Ils devraient ainsi se revoir lors de la réunion informelle des dirigeants de la Coopération économique Asie-Pacifique (APEC) le mois prochain aux Philippines, du sommet sur la sécurité nucléaire qui aura lieu à Washington en mars 2016 et du sommet du G20 qui se déroulera en Chine en novembre 2016.
M. Paal qualifie par ailleurs de "positif" l'accord conclu par les deux parties en vue de renforcer la coopération dans la lutte contre le changement climatique.
La Chine et les Etats-Unis "peuvent y parvenir ensemble et essayer de faire avancer la conférence de Paris en décembre en faisant preuve de leadership auprès de pays qui pourraient être plus réticents à rejoindre le processus de réduction des émissions de carbone", suggère M. Paal.
La Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP21) se tiendra du 30 novembre au 11 décembre à Paris. Les pays vont tenter à cette occasion de conclure un accord contraignant de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
"C'est la première fois depuis un bon moment qu'on a le scénario pour une conférence réussie à Paris", prédit M. Paal, estimant que cette coopération sino-américaine toujours croissante va donner "un grand coup de pouce" à la COP21.
Cette coopération "a donc des retombées internationales positives. Je pense qu'il était important pour les Etats-Unis d'ajuster leur position par rapport au r?le que joue la Chine dans les institutions financières internationales et dans l'aide internationale", relève-t-il.
Commentant l'importance du sommet entre MM. Xi et Obama, qui a lieu chaque année depuis le sommet informel à Sunnylands en Californie en 2013, M. Paal note que les deux dirigeants ont besoin "de trouver un moyen d'avoir une vision d'ensemble de leurs relations".
Il appelle les Etats-Unis à trouver un moyen d'accepter -et non pas de résister ou de contenir- la montée de la Chine, sans devoir pour autant abandonner ses propres intérêts et structures qui ont assuré la paix et la sécurité dans le Pacifique Ouest depuis la Seconde Guerre mondiale.
"C'est un défi difficile à relever", reconna?t M. Paal. "Certains parlent du piège de Thucydide et de la possibibilité d'un conflit des deux pays, de voir les Etats-Unis chassés d'Asie par la Chine ou encore d'une résistance américaine à la montée de la Chine en Asie. Mais ce sont là de bien pauvres hypothèses pour illustrer les défis auxquels les dirigants font face à l'heure actuelle."
Selon M. Paal, il faut réduire les malentendus et la méfiance entre les deux parties "pas à pas".
Depuis la Conférence de travail sur les affaires étrangères organisée par Beijing en novembre 2014, "un nouveau vent" s'est levé en Chine. "On voit aujourd'hui une diplomatie chinoise plus concentrée, plus intégrée et plus active dans une sphère élargie", rappelle-t-il.
Outre sa contribution à la lutte contre le changement climatique, la Chine a également renforcé son r?le dans la lutte contre la crise d'Ebola et pourrait accro?tre son implication dans la lutte contre le terrorisme, ainsi qu'au Moyen-Orient et en Europe de l'Est là où les intérêts de la Chine sont sans cesse croissants, note M. Paal.