Dernière mise à jour à 08h30 le 17/04
Le retour volontaire le week-end dernier de 53 réfugiés soudanais dans leur région natale du Darfour, après des années passées au Tchad, fait espérer aux autorités compétentes que ce mouvement va s'amplifier, même si les défis demeurent nombreux.
"Nous espérons que l'expérience de la réintégration de ce premier groupe des retournés dans le lieu de retour de leur choix va servir de point de référence et de bon exemple à suivre pour les réfugiés soudanais restant au Tchad", a confié le représentant adjoint du Haut-Commissariat aux réfugiés de l'ONU (HCR) au Tchad, Edward O'Dwyer, qui a accompagné ces rapatriés jusqu'à Tiné-Soudan, ville frontalière avec le Tchad.
Au 31 mars dernier, le nombre des réfugiés et demandeurs d'asile soudanais pris en charge par le HCR était évalué à 329.177 personnes, soit plus de 74% de la population totale accueillie sur le territoire tchadien. Ils étaient 137.946 dans la sous-délégation d'Iriba, répartis dans six camps : Amnabak, Kounoungou, Milé, Ouré Cassoni, Touloum et Iridimi.
Le contexte opérationnel et sécuritaire dans l'ouest du Soudan et l'est du Tchad a évolué ces cinq dernières années de manière significative avec l'amélioration des relations diplomatiques entre N'Djamena et Khartoum. La force mixte tchado-soudanaise, créée à l'issue du rapprochement entre les deux pays et déployée le long de la frontière commune, a permis de contenir l'infiltration de groupes armés de part et d'autre.
C'est dans ce contexte que le ministre soudanais de l'Intérieur, Babikir Ahmed Alami Digna, le secrétaire d'Etat tchadien à l'Administration du territoire, Aboubakar Djibrile Aboubakar, et la représentante du HCR au Soudan, Norito Yoshida, ont signé le 31 mai 2017 à Khartoum un accord tripartite relatif au rapatriement volontaire des réfugiés soudanais vivant au Tchad. Des séances de sensibilisation sur le contenu de cet accord ont été organisées dans les différents camps.
Selon une enquête sur les intentions de retour, menée entre fin 2016 et début 2017, 92% des réfugiés interrogés ont clairement dit vouloir rester encore au Tchad et 51% ont exprimé leur intérêt pour l'intégration locale du fait des liens de mariage, des similarités linguistiques et culturelles avec les populations h?tes. A contrario, seuls 4% ont exprimé leur souhait d'être rapatriés dans les brefs délais, 1% dans les six mois à venir et 3% dans un an.
L'accord tripartite offre plusieurs garanties à ceux désirant revenir : pouvoir "rentrer en toute sécurité et dans la dignité, sans avoir peur d'être harcelés, intimidés, persécutés, discriminés, poursuivis ou de subir toute autre sanction pour avoir quitté (le) Soudan ou séjourné hors du pays comme réfugiés"; bénéficier entièrement des dispositions des lois d'amnistie ou de clémence en vigueur au Soudan; un accès à la terre pour leur propre installation et des moyens de subsistance; la restitution de leurs terres et autres biens personnels dont ils ont été dépossédés avant ou pendant leur déplacement et pour lesquels ils peuvent produire une preuve acceptable.
C'est en vertu de ces dispositions que 200 dollars seront remis à chacun des 53 rapatriés, 400 autres dollars pour leur réinstallation, ainsi que des vivres et des biens, a précisé Ahmat al-Djazouli, responsable de la Commission des réfugiés. Ajoutés aux 6.000 francs CFA (11 dollars) que le HCR leur a remis au moment de quitter le camp tchadien d'Iridimi, cela fait assez d'argent pour recommencer une nouvelle vie.
Du cash et une attention qui risquent de rendre jaloux les 400 autres réfugiés soudanais qui ont quitté spontanément différents camps de l'est du Tchad pour venir camper autour du Centre d'accueil de Tiné. Devant l'absence de papier justifiant leur rapatriement, le bureau du HCR au Soudan et la Commission des réfugiés rechignent à leur venir en aide. Ils vivent ainsi dans le dénuement depuis plusieurs semaines sous des tentes de fortune ou dans des maisons en ruine dont ils ont recouvert le toit avec des baches ou des voiles pour se protéger de la chaleur.
Les 53 rapatriés réguliers arrivés samedi, eux, sont hébergés sous des grandes, équipées de tapis et de matelas. Ils resteront là quelques jours, avant d'être acheminés vers leurs villages de Chérif Oumra, Sabarna, Amchouch et Abgamra.