Dernière mise à jour à 09h36 le 14/07
Constitué d'une série de mesures visant à "garantir le droit d'asile et à mieux ma?triser le flux migratoire", le plan migrants du gouvernement, présenté mercredi par le Premier ministre Edouard Philippe, ne convainc pas pour autant les associations ?uvrant pour l'accueil des migrants, les spécialistes des crises migratoires et les opposants.
Parmi ces mesures d'urgence figure celle de "redonner sa pleine portée au droit d'asile", a déclaré M. Philippe, estimant que sur ce point la France n'est pas à la hauteur de ce qu'elle devrait être. L'objectif sera donc de réduire considérablement les délais de traitement de la procédure de demande d'asile par une diminution des délais d'enregistrement des demandes. "Pour permettre la réduction de ce délai, nous devons réformer les plateformes de premier accueil et renforcer les capacités d'accueil des guichets uniques", a annoncé le Premier ministre en conférence de presse.
Outre la réduction des délais de traitement de la procédure de demande d'asile, le plan prévoit de développer l'offre d'hébergement pour les demandeurs d'asile en augmentant le nombre de places disponibles. "Aujourd'hui, environ 40% des demandeurs d'asile n'ont pas accès à l'hébergement que nous leur proposons", a indiqué le Premier ministre, assurant que 4.000 places seront créées en 2018 et 3.500 en 2019. "Nous disposons actuellement de 80.000 places, soit une progression d'environ 10% du nombre de places disponibles sur deux ans", a-t-il expliqué.
Le gouvernement veut également refonder la politique d'intégration pour garantir l'égalité des chances des réfugiés. Pour cela, il compte créer 5.000 places dans les centres provisoires d'hébergement en 2018/2019, afin "de favoriser la transition vers le logement autonome des réfugiés les plus vulnérables".
Le plan migrants prévoit par contre la fermeté concernant l'immigration irrégulière et en matière d'éloignement. Un projet de loi sera présenté en la matière et permettra d'améliorer les procédures de mise en ?uvre des éloignements et de redéfinir le cadre juridique de la rétention, a informé M. Philippe, annon?ant également que les systèmes d'information seront adaptés pour faciliter l'identification des personnes interpellées. Car en 2016, sur 91.000 étrangers en situation irrégulière interpellés sur le territoire fran?ais, seuls 31.000 se sont vus délivrer une obligation de le quitter, et moins de 25.000 ont effectivement quitté le pays, a rappelé le Premier ministre.
Pour mieux ma?triser le flux migratoire, le gouvernement veut maintenir, dans le cadre de l'application des traités européens, le contr?le provisoire aux frontières jusqu'au mois de novembre 2017. Ainsi que le maintien d'une action résolue dans la région des Haut-de-France, pour préserver l'ordre public et éviter la reconstitution de campements ou de points de concentration.
Toutefois, ce plan ne convainc pas les associations de défense des migrants et les spécialistes, malgré les mesures relatives au développement de l'offre d'hébergement des demandeurs d'asile ou encore la réduction des délais de traitement de la procédure de demande d'asile. En effet, selon le directeur de France terre d'asile, Pierre Henry, ce plan "ne permet pas immédiatement de répondre aux situations d'urgence que nous connaissons à Paris, à Calais, etc.", a-t-il indiqué sur France 2.
Maryline Baumard, journaliste spécialiste des crises migratoires, trouve ce plan "tellement ambitieux qu'il n'est pas du tout réaliste". "Il n'y a rien qui est prévu dans ce plan pour améliorer le quotidien des migrants qui sont à Calais, Paris... Ce plan est pensé comme si déjà le gouvernement avait réussi à juguler la crise migratoire", a affirmé sur BFMTV Mme Baumard.
Certains députés de l'opposition aussi se disent insatisfaits. C'est le cas de Marine Le Pen, qui a une position tranchée sur la question : "Les mesures prises ne visent pas du tout à arrêter le flux migratoire mais à l'organiser", a-t-elle déclaré. Dans un texte intitulé "Plan immigration : le gouvernement désarme nos frontières", publié mercredi soir, le député Les Républicains, Eric Ciotti, dénonce un plan qui "arrive tard" et se "révèle insuffisant". "Loin de l'ambition affichée, ce plan d'action constitue une non-réponse à une question très grave. Le gouvernement contourne la difficulté sans apporter de solutions", a-t-il ajouté.
Pour le député Eric Coquerel de la France insoumise, "on ne va rien régler s'il n'y a pas des centres d'accueil dignes de ce nom". Il dénonce la décision d'expulser les migrants économiques qui, dit-il, "fuient leur pays pour des raisons de crise climatique ou des accords de libre-échange qui détruisent leur économie et pour lesquels nous sommes responsables".