Dernière mise à jour à 08h33 le 17/01
Il est environ 23 heures, par une froide nuit d'hiver, et Lu Huizhong patrouille les ruelles étroites et sinueuses entre des maisons chinoises traditionnelles en tenant un gong dans une main et un maillet dans l'autre.
M. Lu, agé de 63 ans, frappe sporadiquement le gong en métal sur son parcours, rappelant aux habitants de faire attention aux risques d'incendie avant de s'endormir.
Il s'agit d'une ancienne tradition chinoise qui a perdu sa place à mesure que les gens ont emménagé dans des batiments en béton dotés d'alarmes incendie et de détecteurs de fumée. Elle perdure néanmoins dans le village de M. Lu.
Le village de Xidi, dans la province orientale de l'Anhui, qui abrite des maisons chinoises millénaires de style local, est inscrit au patrimoine culturel mondial de l'UNESCO. Environ 224 maisons en bois font de la prévention des incendies une grande priorité.
"Les maisons du village sont construites les unes à c?té des autres, et les camions de pompiers ne peuvent y accéder aisément. Nous avons donc mis en place une équipe de surveillance nocturne chargée de rappeler aux villageois la sécurité face aux incendies", explique Huang Yu, chef de l'équipe.
M. Lu est membre de l'équipe depuis plus de trois ans et a développé un code pour l'utilisation du gong.
"Je bats le gong à chaque carrefour et tous les 100 mètres. Il ne faut pas le faire retentir devant la porte des gens ou à l'extérieur des foyers avec enfants. Il faut frapper plus fort près des familles avec des personnes agées seules", précise M. Lu.
Il y a 99 ruelles dans le village, et M. Lu a mémorisé l'itinéraire de patrouille en zigzag et conna?t chacune des familles.
Cette tradition est transmise de génération en génération par l'équipe de surveillance nocturne. Chaque parcours peut durer plus d'une heure, et l'équipe en effectue deux en été, à 23 heures et à 2 heures du matin.
Généralement, M. Lu termine son travail de jour et rentre chez lui au crépuscule. Il dort plusieurs heures avant de se préparer pour les patrouilles nocturnes.
"Nous l'attendons toujours à la maison pendant la patrouille", indique Hu Yixia, sa femme. "Et quand le son du gong se rapproche, je sais qu'il est sur le point de rentrer."
Malgré les inquiétudes concernant la sécurité de son mari dans des conditions météorologiques extrêmes, telles que la neige jusqu'aux genoux fin 2018, M. Hu explique que sa famille soutient son travail.
Toute l'année, l'équipe patrouille dans le village sans manquer une nuit et a usé plus d'une douzaine de gongs. Depuis plus de deux décennies, aucun incendie n'est survenu la nuit.
"Je me suis habitué au son du gong. Quand je l'entends la nuit, je me sens en sécurité", raconte Wang Jiaping, un habitant agé de 68 ans. "Le village est aussi plus s?r."