Dernière mise à jour à 13h28 le 07/02
Térence Ntahiraja, l’assistant du ministre et porte-parole du ministère de l’intérieur et de la formation patriotique. |
Ce n'est pas une nouvelle loi comme beaucoup le pensent. Ce n'est qu'un rappel d'une loi qui date de 1980. Depuis le 1er mai 2017, les ménages vivant en union libre sont recommandés de régulariser leur cas. Pour ceux qui se posent la question de savoir le sort des musulmans polygames, l'assistant du ministre et porte-parole du ministère de l'intérieur et de la formation patriotique, Térence Ntahiraja, explique que le Burundi est un pays la?c et que tous les burundais doivent être traités au même niveau indépendamment de leurs croyances. Ladite loi reste en vigueur et son non application suscitera des amendes pour les récalcitrants. Le délai a été prolongé à 3 mois, datant du 1er janvier 2018 au 31 mars 2018. Les avis des uns et des autres comptent.
Dans sa déclaration, durant la fête des travailleurs du 1er mai 2017, le Président de la République Pierre Nkurunziza a profité de cette occasion pour rappeler aux Burundais et donner un clin d'?il en ce qui concerne la régularisation des ménages en unions libres. En effet, comme le dit Terence Ntahiraja, le mariage légal est désormais obligatoire au Burundi. Tous les couples vivant en union libre ont été recensés à travers tout le pays. 238 008 ménages ont été trouvés vivant en union libre avec la fin du mois de juin 2017. Des chiffres qui vont varier grace au retour des Burundais qui reviennent d'exil. Ainsi, avec l'an 2017, on a aidé plus de 30% de ces couples à régulariser leurs cas. Un peu plus de 60 % doivent encore recourir à ce processus. Ceux qui refuseront de se conformer à la loi après le délai donné, recevront une amende. Cette dernière concordera avec les pénalités prévues par la loi se retrouvant dans le code des personnes et de la famille. Cette durée a été ainsi prolongée jusqu'au mois de mars 2018.
Lutter contre la polygamie et les grossesses précoces pour mieux contr?ler la démographie galopante
Il faudra rappeler qu'avant cette loi de 1980, les Burundais contractaient des mariages selon les traditions burundaises. Les familles témoignaient du mariage, le prêtre bénissait pour les chrétiens, et l'on ne souciait jamais de savoir si cette union était légale ou non. Il n'y avait pas de loi pour cela. C'est pour cela que cette loi concerne ceux ayant contractes leurs mariages après 1980.
En vue de moraliser la population, la rendre responsable et mieux contr?ler la démographie, le gouvernement burundais a entrepris une campagne de moralisation. Ceux ayant contracté leur mariage et vivant en union libre après la signature de la loi en 1980 doivent régulariser leur union à l'état civil.
Cette loi n'est donc pas nouvelle. Il y a juste eu ignorance de la loi au fur et à mesure. Cela est devenu normal.
Sur un territoire de seulement 27 834 km carrés, le Burundi compte déjà une population de 11 millions. Selon notre interlocuteur, M. Ntahiraja, il est important de penser au sort des enfants qui naissent et qui ne sont pas reconnus par leurs pères. Dans certaines localités du pays, des femmes sont laissées à elles même, tandis que certains hommes se permettent deux ou trois femmes sans en reconnaitre une. Cela est un entrave pour ces femmes car certaines se retrouvent démunies à la mort de leurs maris, d'autres réclament l'assistance mais se retrouvent sans mari car l'homme a entrepris cette union alors qu'il est en union avec une autre. Beaucoup d'entre elles étant des filles mineures.
Qu'en est-il des foyers musulmans polygames?
M. Ntahiraja indique que le Burundi est un Etat la?c. Ce n'est pas la loi qui se conforme aux confessions religieuses mais plut?t les gens qui doivent se conformer à la loi. Cela parce que tous les Burundais doivent être traités de la même manière. Pour les foyers musulmans donc, rien ne les oblige à prendre plus d'une femme. La polygamie reste illégale qu'elle soit permise ou pas par la religion. Signalons que certains hommes musulmans préfèrent prendre une seule femme.
A ces propos, Sheikh Kassim Jafari indique que prendre plus d'une femme n'est pas une obligation au sein de l'islam. Nulle part dans le coran n'est écrite que l'homme devrait prendre plus d'une femme. L'homme qui le peut prend deux ou trois ou quatre femmes. Mais encore faut-il qu'il les traite de la même manière. Or, on doit admettre qu'il est difficile de traiter quatre individus de la même manière. Selon M. Kassim, la régularisation d'une union libre en Islam ne cause aucun problème. Les vrais musulmans ne sont pas contre la loi. S'il faut qu'il régularise son mariage pour le rendre légal, l'homme rassemblera ses femmes pour qu'elles se conviennent sur qui va aller signer à l'état civil. Ce qui n'empêche pas à ce dernier de continuer à assister ses autres coépouses comme il le faisait avant comme la religion le lui demande. ? De toutes manières, la loi doit être respectée. Les musulmans ne sont pas différents des autres citoyens par leurs croyances seulement. A la question de savoir s'il n'y aura pas de conflits entre les femmes musulmanes mariées à un seul homme, Sheikh Kassim dit qu'il ne peut y avoir aucun conflit d'autant plus que la fille musulmane est déjà au courant de cela avant de se marier mais en plus, l'homme doit jouer un grand r?le pour cela.
Une femme musulmane rencontrée à cet effet déclare que pour elle cette loi ne changera rien pour les foyers musulmans. Certains hommes musulmans déjà polygames connaissent leurs taches. Même avant la venue de la loi, ces hommes s'occupaient de leurs familles. Pour elle, s'il faut que l'homme choisisse une seule femme, il sera difficile pour les autres d'accepter qu'elle représente les autres. C'est une réalité. Toutefois, elle ne nie pas qu'il faut respecter la loi et se conformer aux normes du pays.
Qu'est ce qui garantit le respect de cette loi
Des personnes doivent travailler en symbiose pour que cette loi soit respectée. Ce sont les familles, les futurs mariés, les confessions religieuses et l'administration. Pour cela, il faut que les parents ne soient pas trop exigeants envers leurs enfants, qu'ils les permettent de faire le minimum afin qu'ils ne décident pas de vivre ensemble en union libre. Cela va avec le paiement des dots. L'encouragement et les conseils des parents peuvent aider à batir des foyers stables et légaux.
Aux jeunes mariés, même se marier doit se conformer à la loi. L'amour ne supprime pas le respect de la loi. Et surtout que les conjoints doivent être protégés par cette loi, les femmes surtout. S'il faut qu'elles se défendent ; il faut que la loi ait été mise en application. Les unions sont des pièges envers les femmes comme on l'a toujours constaté dans certains foyers où les femmes n'étaient pas enregistrées à l'état civil.
Les confessions religieuses devraient exiger aux futurs mariés de se présenter d'abord à l'état civil avant de se diriger vers l'Eglise ou les mosquées pour bénédictions. Quant à l'administration, ils devraient aider à sensibiliser la population et de veiller au respect de cette loi, punir si la loi est enfreinte. Le ministère de l'intérieur quant à lui doit suivre sur terrain la mise en application de cette loi.
BLANDINE NIYONGERE