Martin Schulz a été réélu mardi président du Parlement européen (PE), ce que les critiques décrivent déjà comme un "coup monté" entre les grands blocs politiques du Parlement.
Martin Schulz, 58 ans, social-démocrate allemand, a conduit le groupe de centre-gauche Socialistes & Démocrates (S&D) au PE. Sa nomination dépendait fortement de l'appui du Parti populaire européen (PPE) du centre-droit. Bien que le président du PE ait été élu à bulletin secret, cette élection a soulevé des soup?ons que le soutien du PPE pour Schulz ferait partie d'un accord dans lequel le S&D voterait pour Jean-Claude Juncker comme le nouveau président de la Commission européenne (CE).
Le PPE n'a même pas présenté de candidat pour la présidence du PE. Trois autres candidats étaient opposés à Schulz, à savoir, le Conservateur britannique Sajjad Karim (101 votes), l'Espagnol Pablo Iglesias représentant la gauche et l'écologiste autrichienne Ulrike Lunacek (ces deux derniers ont conquis chacun 51 suffrages).
Lors d'une conférence de presse à l'issue de son élection, M. Schulz a défendu le "spitzenkandidat" (tête de liste) en vertu duquel l'ancien Premier ministre luxembourgeois Juncker a été présenté pour le poste de la présidence de la CE.
"J'ai été très engagé dans ce processus", a-t-il dit. "En tant que concept, je suis très en faveur de celui-ci. S'il y a une le?on à tirer, je dirais que cela ne devrait pas prendre des semaines et des semaines (à discuter) pour désigner un candidat, nous pouvons le faire beaucoup plus rapidement. Je ne pense pas que nous allons revenir sur ce processus".
En tant que président du PE, la position de Schulz doit être politiquement neutre, défendre principalement l'intégrité du Parlement et tous ceux qui y siègent. Cependant, il avait déjà été critiqué pour avoir politisé la présidence de la dernière législature.
Même au cours de sa conférence de presse, Schulz a réitéré ses objectifs préférés pour réparer ce qu'il considère comme les principaux problèmes de l'économie européenne, à savoir les marchés financiers, la "spéculation" et l'évasion fiscale.
Un tel discours pourrait précéder de fortes batailles avec des chefs d'Etat, comme la chancelière allemande Angela Merkel, qui veulent que certains Etats de l'Union européenne (UE) se soumettent à des réformes structurelles majeures, comme la libération de leur marché du travail, pour rendre l'Europe plus compétitive face aux économies émergentes.
Depuis sa fondation, le PE a toujours été dominé par un compromis entre les groupes de centre-droit et de centre-gauche. Mais dans les dernières élections européennes, les partis eurosceptiques ont obtenu un nombre important de sièges et sont maintenant dans une position beaucoup plus forte au sein du Parlement.
Lors de la cérémonie d'ouverture de la première séance plénière de mardi, les députés eurosceptiques, y compris le Britannique Nigel Farage et la Fran?aise Marine Le Pen, soit ont tourné le dos à l'hémicycle, soit sont restés assis lors de l'hymne de l'UE, Ode à la Joie de Beethoven.
Cette hostilité au principe même de l'assemblée transnationale ne fera que renforcer la nécessité pour le PPE et S & D, avec le groupe libéral ADLE, à coopérer davantage, ce qui pourrait susciter encore plus de scepticisme parmi les électeurs.
Schulz a parlé de ses attentes pour la nouvelle relation entre le PE et la CE : "Mon souhait est que le Parlement européen ait plus de pouvoir et que le nouveau président de la Commission prenne cela en considération. Donc, avant d'utiliser le pouvoir d'initiative pour introduire la législation, il faut d'abord discuter avec le Parlement".
"Il est important pour la CE de ne pas précipiter les choses, mais de réfléchir sur la fa?on d'obtenir une majorité; ce serait le moyen le plus efficace pour obtenir le soutien du Parlement. Si la CE aborde les choses dans cet esprit, je suis s?r que tout le monde trouvera le PE beaucoup plus coopératif", a-t-il poursuivi.
Schulz a également tenté de tendre une branche d'olivier au Premier ministre britannique David Cameron. Il a dit qu'il est à l'écoute des hommes politiques britanniques et de leurs préoccupations et il reconnait qu'il y a "beaucoup de sujets à discuter".
Cela pourrait être le principe de la subsidiarité, même s'il y a plus de décisions mieux traitées au niveau national. "Il y a des choses qui peuvent être accomplies sans changement de traité", a-t-il estimé. "Mais il faut d'abord dialoguer. Je suis prêt à discuter avec les Britanniques de leurs préoccupations et trouver des moyens pour améliorer les choses", a conclu Schulz.