Estimé à des milliers de dollars américains, le Programme de développement des infrastructures en Afrique visant à créer des réseaux routiers, ferroviaires et électriques interconnectés, mise sur l'apport des pays émergents qui s'affirment des partenariats aux résultats rapides, selon Aboubakari Baba Moussa, directeur des infrastructures à la Commission de l'Union africaine (UA).
Devenu un p?le de croissance par excellence, le continent noir a beaucoup à gagner de la coopération avec ces pays désignés sous le vocable de Brics, à savoir le groupe constitué du Brésil, de la Russie, de l'Inde, de la Chine et de l'Afrique du Sud, recommande Baba Moussa, interrogé par Xinhua lors du dernier sommet de l'UA fin janvier à Addis-Abeba.
Question : Quel est le niveau de la coopération entre l'Union africaine et les pays émergents, en particulier avec la Chine ?
Réponse : Je vous remercie de me donner l'occasion de faire effectivement une analyse du partenariat entre l'Afrique avec en général les pays dits émergents que je voudrais citer, en particulier la Chine, la Corée, le Brésil, l'Inde. On peut aussi citer dans cette foulée certains pays comme la Turquie, qui ont une approche particulière avec l'Afrique, dans un nouveau contexte qui est celui où l'Afrique est devenue un p?le de croissance par excellence depuis ces cinq dernières années.
Au moment où on projette que le monde va avoir 3% de croissance, l'Europe 2%, l'Afrique en général est projetée de 5 à 6%, ce qui est une bonne chose avec des pays comme l'Ethiopie, le Ghana, qui font des croissances à deux chiffres, 10 à 14%. ?a se conforte que l'Afrique est potentiellement la zone où le développement va s'installer. Dans un tel contexte, on voit bien que les stratégies de partenariat traditionnelles que nous avons eues depuis nos indépendances avec les pays occidentaux ont montré leurs limites, et dans l'apport au développement concrètement.
Q : En quoi est-ce que cette coopération se détache-t-elle de celle dite traditionnelle avec les anciennes puissances tutélaires ?
R : Avec ces pays émergents, nous sommes proches du point de vue de leurs cultures, du point de vue de leurs niveaux de développement. La Corée du Sud se trouvait se trouvait au même niveau de développement que la C?te d'Ivoire en 1965. Du point de vue des infrastructures, du point du PIB (produit intérieur brut), c'est vérifié. Aujourd'hui, elle est parmi les grandes économies. Il y a une nouvelle forme de stratégie de coopération qui est basée sur le gagnant-gagnant, mais sous la forme d'exploitation directe des matières premières de l'Afrique, une sorte de "troc" où l'Afrique voit des résultats rapides.
En infrastructures où c'est le plus visible, nous sommes en train de faire deux niveaux de bilan. Le bilan au niveau national : cette coopération qui se fait de fa?on bilatérale entre ces pays et les pays africains. Elle est en général dynamique, elle se concrétise par la fourniture de services et des équipements d'infrastructures sur le terrain. Et en échange, nos pays facilitent l'accès à nos matières premières, particulièrement à un pays comme la Chine dont le développement nécessite d' immenses matières premières, en pétrole, en fer, en uranium, en bauxite... Donc, ils font des échanges et nous voyons que progressivement dans des délais relativement courts, des barrages hydroélectriques sont construits. Au Soudan, on a l'exemple concret. Des infrastructures routières, il n'y a pas une zone où ce n'est pas fait. En Afrique du Nord, les logements sociaux sont facilement construits par les Chinois en Algérie.
Q : Et pour le deuxième niveau de coopération, quelle évaluation est-elle faite ?
R : Le deuxième niveau de cette coopération, c'est au niveau continental ou régional. C'est à ce niveau qu'il y a moins de résultats palpables. Il y a des résultats, parce qu'il faut honnête, grace à la Chine aujourd'hui nous sommes dans un batiment extrêmement luxueux et opérationnel. En venant maintenant aux politiques sectorielles, ils ont montré leur disponibilité à aller dans les projets d'intégration. Et ces projets d'intégration généralement nécessitent une coordination pour leur mise en ?uvre. Ce ne sont pas des projets qui vont être exécutés par des pays individuellement pris, bénéficiant d'un apport d'investissement direct. C'est dans cette dynamique que l'Afrique commence à s'inscrire et collégialement. La création d'une richesse continentale ou régionale amène à mettre ensemble les ressources pour créer de la production régionale.
C'est les infrastructures qui faciliteront le commerce intra-africain. Mais il ne s'agit pas d'infrastructures à la taille nationale ; il s'agit de réseaux transafricains, comme on les appelle, qui doivent quitter Dakar pour aller à Djibouti, Le Cap pour aller au Caire, Le Caire pour aller à Dakar en passant par tous les pays de l'Afrique du Nord, l'Algérie, le Maroc, la Mauritanie, quitter Djibouti jusqu'à Libreville. Il y a un certains nombre des corridors que nous développons. C'est la même chose pour l'énergie. Nous sommes obligés de mettre en place ce que nous appelons l'interconnexion électrique des régions africaines et des Etats au sein d' une région.
Q : Parmi ces projets, est-ce qu'il y en a qui sont sur la table des négociations avec les pays émergents ?
R : Il y en a qui sont sur la table des négociations. Vous le savez, les Etats ont adopté ce que nous appelons le Programme de développement des infrastructures en Afrique (PIDA) qui a 51 projets phares, pour a période 2010-2020. ?a fait un paquet qu'il faut forcément promouvoir. Ces projets ont été tous acceptés par nos partenaires et mis dans leur agenda, de fa?on globale et en particulier ces pays émergents. De fa?on spécifique, nous sommes en train de pousser certains projets que nous avons appelé les projets phares, qui sont les plus avancés du point de vue de leur préparation (études de faisabilité, analyse technique), qui sont déjà sur la table de ces partenaires.
Par Rapha?l MVOGO