Dernière mise à jour à 08h19 le 20/11
Les relations économiques entre les Etats-Unis, la Chine et le Japon revêtent une importance cruciale pour la coopération économique du forum de Coopération économique Asie-Pacifique (APEC), car ces pays sont les trois plus grandes économies au monde, indiquent certains experts.
La réunion de deux jours des dirigeants économiques de l'APEC, qui porte sur le renforcement de l'intégration économique régionale et le développement dans un contexte de ralentissement de la croissance mondiale, s''est achevée jeudi.
Des relations saines entre les Etats-Unis, la Chine et le Japon, des acteurs clés de l'APEC, permettont non seulement de promouvoir le développement économique dans la région, mais faciliteront aussi la construction et l'amélioration du mécanisme de coopération, ce qui permettra à l'institution d'accélérer l'intégration régionale.
L'IMPORTANCE DES TROIS PLUS GRANDES ECONOMIES
Le contient asiatique représente un tiers de la production économique mondiale et l'économie de l'APEC représente près de 60% du PIB mondial.
"Le développement de l'Asie-Pacifique aura à n'en point douter un impact majeur sur le monde", a indiqué Cui Tiankai, ambassadeur de Chine aux Etats-Unis, lors d'un discours prononcé à Houston en mai.
Soulignant l'importance de la zone économique asiatique par rapport à l'Europe et à l'Amérique du Nord, Kiyoyuki Seguchi, directeur de recherche de l'Institut japonais Canon pour les études internationales, estime que l'Asie, qui a la croissance la plus rapide de ces trois zones, est au centre de l'économie mondiale.
Son développement bénéficiera non seulement aux pays de la région, mais aussi aux économies d'autres continents, relève-t-il avant de noter que les Etats-Unis essaient de contribuer davantage au développement économique de l'Asie afin de stimuler leur propre croissance.
Evoquant le r?le de la Chine, des Etats-Unis et du Japon dans l'APEC, Zhao Jianglin, chercheuse à l'Institut national de stratégie internationale de l'Académie chinoise des sciences sociales, indique que les trois pays ont une double influence.
Selon elle, au niveau du marché et du commerce, les trois pays sont le moteur de la croissance économique de l'APEC.
Les investissements étrangers à long terme du Japon, les importations de produits des Etats-Unis (en particulier de biens de consommation) et la croissance rapide et l'influence croissante de la Chine ont contribué au r?le crucial des trois pays dans le développement économique mondial.
Au cours du premier semestre de 2015, le volume du commerce international des Etats-Unis a atteint 2.187,4 milliards de dollars, dont près de 60% d'importations, selon le ministère américain du Commerce.
Les trois économies jouent également un r?le crucial dans la définition de la politique de l'APEC, ajoute Mme Zhao. Les interactions entre la Chine et les Etats-Unis sur le plan politique, telles que les négociations sur un traité d'investissement bilatéral, aideront à créer un environnement stable pour le développement économique de la région et à mettre en place un mécanisme de coopération pour l'APEC.
Les interactions positives entre ces trois grandes économies ne peuvent qu'apporter des bénéfices collectifs à la région, souligne-t-elle.
PARTENARIAT TRANSPACIFIQUE ET ZONE DE LIBRE-ECHANGE DE L'ASIE-PACIFIQUE
Lors du sommet de l'APEC organisé à Beijing en 2014, les membres de l'APEC ont décidé de lancer une étude stratégique conjointe sur la zone de libre-échange de l'Asie-Pacifique (FTAAP), marquant ainsi le lancement officiel du processus de création de la zone de libre-échange régionale.
La faisabilité et la rentabilité de la FTAAP sont en cours d'évaluation et les conclusions devraient être rendues publiques l'année prochaine. La zone de libre-échange, qui regroupera les 21 membres de l'APEC, devrait entrer en vigueur au plus tard en 2025 une fois les accords conclus.
Parallèlement, les Etats-Unis, le Japon et dix autres membres de l'APEC ont conclu l'accord du Partenariat transpacifique (PTP) le mois dernier après des années de négociations intensives. Ce pacte commercial proposé par les Etats-Unis a été accusé de n'être ni inclusif, ni ouvert.
D'un point de vue politique, exclure la Chine et la Russie du PTP envoie un mauvais signal, fait remarquer Fariborz Moshirian, directeur de l'Institut de finance mondiale de l'Université de Nouvelle-Galles du Sud en Australie.
Dans un monde idéal, les négociations sur des accords régionaux tels que la FTAAP devraient passer par l'Organisation mondiale du commerce (OMC), où les décisions sont prises en s'appuyant sur des données économiques, indique-t-il.
Des estimations économiques de 2014 montrent que les revenus apportés par la FTAAP seraient huit fois plus élevés que ceux apportés par le PTP, selon un rapport publié par Xinhua la semaine dernière.
"La conclusion d'un nombre croissant d'accords commerciaux bilatéraux et multilatéraux entre les membres de l'APEC a entra?né, dans une certaine mesure, un manque de confiance en l'objectif global de l'APEC", avertit Akihiro Hoshino, chercheur en stratégie quantitative à Nomura Holdings Inc., avant d'ajouter que les disputes diplomatiques régionales ont compromis les efforts, les ambitions et les objectifs du mécanisme de l'APEC.
La zone de libre-échange de l'Asie-Pacifique reste la vision ultime de l'APEC, car les 21 économies y participeraient, indique Matthew Goodman, conseiller en économie asiatique et titulaire de la chaire William E. Simon d'économie politique du Centre pour les études stratégiques et internationales (CSIS), un think-tank américain.
"Je pense que les Etats-Unis continueront à considérer la FTAAP comme la vision ultime", estime-t-il.
"Je ne pense pas que les Etats-Unis souhaitent démarrer maintenant des négociations, de vraies négociations sur la FTAAP. Ils doivent ratifier le PTP et le mettre en oeuvre. Mais à terme, la FTAAP est l'objectif et je suis s?r qu'il y aura des négociations", explique M. Goodman.
RESOLUTION APOLITIQUE
Le président chinois Xi Jinping a effectué une visite historique aux Etats-Unis en septembre. Dans la foulée, le Premier ministre chinois Li Keqiang et la présidente sud-coréenne Park Geun-hye ont rencontré le Premier ministre japonais Shinzo Abe à Séoul début novembre dans le cadre d'un sommet historique trilatéral après une suspension de trois ans et demi en raison des contentieux territoriaux et historiques entre le Japon et ses voisins.
"Il est encore plus nécessaire d'avoir un dialogue direct lorsque des conflits dégénèrent, et tous les pays doivent reconna?tre cela et en faire une priorité", souligne M. Seguchi.
Selon lui, la Chine, le Japon et la Corée du Sud se sont engagés lors du sommet à accélérer les pourparlers de libre-échange trilatéral et que les pays régionaux devraient faire preuve d'une "résolution apolitique" pour accélérer le processus de création de la FTAAP.
M. Seguchi suggère que les trois plus grandes économies travaillent ensemble pour créer des normes ou établir de nouvelles règles qui pourront être acceptées par toutes les parties afin de former la zone de libre-échange de l'Asie-Pacifique.
Cette approche "apolitique" est également soutenue par M. Hoshino, qui insiste sur l'urgence de mettre de c?té les questions non liées au commerce. Les Etats-Unis, la Chine et le Japon ont besoin de maintenir une vision réaliste sur le PTP, poursuit-il.
M. Goodman, qui a également été coordinateur de l'APEC et des sommets d'Asie de l'Est à la Maison Blanche sous le premier mandat du président américain Barack Obama, ne tarit pas d'éloges sur l'APEC.
"L'APEC est un forum un peu différent, car il n'implique pas de négociations, mais des discussions sur la fa?on de supprimer les obstacles au commerce et à l'investissement de manière non contraignante mais consensuelle", indique M. Goodman.
Il est plus facile de progresser sur certaines mesures de libéralisation utiles que sur des négociations formelles dans le cadre de l'APEC, relève-t-il.
Selon M. Hoshino, en tant que trois plus grandes économies de l'APEC, il incombe aux Etats-Unis, à la Chine et au Japon d'engager un dialogue progressif et tourné vers l'avenir qui définira des orientations pour l'APEC et encouragera les pays parties à l'accord de libre-échange et les pays non parties à surmonter les disparités régionales dans l'intérêt de la région.