Dernière mise à jour à 08h34 le 16/01
La Première ministre britannique Theresa May a présenté devant la chambre des communes ses derniers arguments dans la bataille pour le Brexit à la veille du vote parlementaire.
La lettre de Jean Claude Juncker envoyée à Theresa May lundi 14 janvier, qui clarifie davantage et confirme les garanties de l'Union européenne concernant la frontière Irlandaise, devrait peser sur le vote du parlement britannique attendu mardi soir.
C'est dans une usine de fabrication de tasses en terre-cuite à Stoke-on-Trent (centre de l'Angleterre) que Theresa May a amorcé son plaidoyer de la dernière chance sur le Brexit, en présentant quelques grandes lignes de celui-ci à un public pro-Brexit, mais aussi en présence des journalistes de différents médias. Quelques heures plus tard, elle défendra son accord du retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne devant la Chambre des communes.
S'appuyant sur la lettre des 27 membres de l'UE, cosignée par Donald Tusk, Président du Conseil de l'Union européenne et Jean Claude Juncker, Président de la Commission de l'UE, la Première ministre a insisté sur les nombreux avantages et garanties que procurerait l'accord sur le Brexit conclu entre les deux partenaires en novembre 2018 à Bruxelles.
On peut lire dans cette lettre que l'accord de retrait et le protocole sur la République d'Irlande et l'Irlande du Nord n'affectent ni ne remplacent, de quelque manière que ce soit, les dispositions de l'accord de paix du vendredi saint conclu le 10 avril 1998. Cet accord de paix avait mis fin à 3 décennies de violences en Irlande du Nord.
Concernant le "Backstop" (filet de sécurité), Theresa May a défendu une fois de plus l'intérêt d'approuver l'accord par un vote parlementaire positif, afin d'éviter un éventuel retour à une frontière physique entre l'Irlande du Nord et la République d'Irlande en cas de "no-deal". En effet, les dirigeants européens promettent que la disposition controversée du "Backstop" n'a pas vocation à entrer en vigueur. Si tel est le cas, ?a ne serait que temporaire, dans l'attente d'un traité de libre-échange.
Cette question fait craindre le rejet de l'ensemble de l'accord sur le Brexit, si ce "Backstop" venait à entrer en vigueur. Pour Nigel Dodds, député du Parti unioniste démocrate (DUP), le groupe de dix élus Nord-irlandais, la lettre de Jean Claude Juncker ne rassure pas, au contraire, elle vient conforter leurs inquiétudes. Elle "n'apporte pas ce dont a besoin la chambre des Communes" a-t-il ajouté. Rien de rassurant pour Theresa May, qui compte pourtant sur les membres du DUP pour obtenir la majorité absolue au Parlement.
Plusieurs parlementaires britanniques ont fustigé la Première ministre sur l'absence de changement dans l'accord de retrait. "La première ministre a purement et simplement échoué à obtenir les assurances promises", a clamé le leader de l'opposition travailliste, Jeremy Corbyn. Il a appelé à rejeter l'accord. Pour Theresa May, un rejet de l'accord sur le Brexit pourrait mener à un scénario catastrophique. Le Royaume-Uni risque de rencontrer des turbulences dans économiques, des barrières en matière de coopération, des troubles au niveau de la sécurité, de l'emploi, etc. "Quand les livres d'histoire seront écrits, les gens se demanderont : avons-nous laissé tomber le peuple britannique??" a-t-elle conclu.
Si le texte est effectivement recalé, le Royaume-Uni risque de quitter l'UE sans accord le 29 mars 2019, un scénario redouté par les milieux économiques. Tout va dépendre de l'ampleur de la défaite au Parlement. Si le texte de Theresa May perd de quelques voix, elle pourra tenter de négocier quelques points avec l'UE, puis reviendra présenter son texte au Parlement britannique.
En revanche, le scénario redouté est une large défaite, par une centaine de voix. Dans ce cas, elle devra proposer aux parlementaires un plan B dans les 3 jours. L'hypothèse serait de faire valoir l'extension de l'article 50 de l'Accord sur le Brexit, qui décalerait la date du Brexit du 29 mars à une date ultérieure. Un second référendum pourrait aussi être proposé, même si la Première ministre s'y oppose fermement depuis 2 ans.
Certains dirigeants des 27 ont réagi à l'hypothèse d'un "no-deal" sur le Brexit. Tel est le cas du Président fran?ais Emmanuel Macron, pour qui, en cas de rejet de l'accord, "ce sera à Londres de formuler des demandes et propositions" à l'Union européenne.
Il est possible de prolonger le délai du Brexit, de continuer à chercher un compromis, a renchéri lundi 14 janvier le chef de la diplomatie espagnole, Josep Borrell. Rejeter ce texte risque de compromettre le Brexit et de saper la démocratie, a déclaré la Première ministre. "Nous avons tous le devoir de mettre en oeuvre le résultat du référendum de juin 2016", a-t-elle prévenu. Sinon, "cela causerait un préjudice catastrophique à la confiance du peuple dans le processus démocratique et dans ses responsables politiques".
Theresa May retient son souffle en attendant le vote des parlementaires ce soir (21h). Cependant, à deux mois de la date buttoir de retrait, les responsables politiques britanniques sont mis devant leurs responsabilité.