Après 54 ans de confrontation et d'animosité, Cuba et les Etats-Unis ont rouvert des ambassades dans leurs capitales respectives lundi.
Malgré l'enthousiasme que les deux parties ont manifesté à cette occasion, elles restent confrontées à la tache difficile de rétablir leur confiance mutuelle gravement entamée.
La Havane ne semble toujours pas pleinement convaincue de la sincérité de Washington à vouloir améliorer les relations, et ce pour des raisons justifiées.
S'exprimant lundi à Washington, le ministre cubain des Affaires étrangères Bruno Rodriguez a déclaré que la soif de domination des Etats-Unis restait une menace et que leur "insistance à poursuivre des objectifs obsolètes et injustes [...] ne rendra pas ces objectifs légitimes ni favorables aux intérêts nationaux des Etats-Unis et de leurs citoyens".
Le 15 juillet, moins d'une semaine avant la réouverture des ambassades, le président cubain Raul Castro a prévenu que le rétablissement des relations diplomatiques ne signifiait pas la normalisation des relations entre les deux pays.
S'exprimant devant le Parlement, M. Castro a déclaré que les relations bilatérales ne seraient pas normales tant que les Etats-Unis n'auront pas rendu le territoire de Guantanamo, cessé la diffusion de leurs radios et télévisions vers Cuba et mis fin aux programmes visant à encourager les mouvements d'opposition au gouvernement dans l'?le.
La prudence de M. Castro est aussi évidente que compréhensible. Malgré toutes les paroles de Washington visant à amadouer La Havane, les Etats-Unis ont répondu à peu de craintes exprimées par Cuba.
Le blocus imposé à l'?le depuis des décennies n'a pas été levé, la politique d'immigration des Cubains vers les Etats-Unis est toujours en place, la base navale américaine de Guantanamo reste ouverte et les médias soutenus par les Etats-Unis continuent de diffuser des émissions contre La Havane.
Or, bien que le président américain Barack Obama s'efforce de faire du rétablissement des relations américano-cubaines une réalisation durable de sa présidence, ses efforts ont essuyé le mépris des candidats républicains à la présidentielle.
Mario Rubio, un sénateur républicain de Floride et fils d'immigrés cubains, a déclaré qu'il reviendrait sur ces changements et placerait de nouveau Cuba sur la liste des soutiens du terrorisme s'il était élu président.
Les pressions internationales pour que les Etats-Unis lèvent le blocus contre Cuba s'intensifient depuis des années et des manifestations massives auraient lieu si un prochain président américain chercher à annuler cette décision.
Ces dernières années, Cuba a tenté d'accro?tre sa présence diplomatique à travers le monde en accueillant les dirigeants fran?ais, allemand, russe et de l'Union européenne.
"Nous ne savons toujours pas quelle forme ce nouveau processus diplomatique prendra. Il exigera des négociations extrêmement intenses, car les Etats-Unis plaident pour une ouverture politique et économique de Cuba", a indiqué Mario Torrico, professeur à l'Académie des sciences sociales d'Amérique latine de Mexico.
Bien que le 20 juillet 2015 restera dans l'histoire comme la date d'un événement triomphal pour les relations américano-cubaines, une chose est certaine : du temps sera nécessaire avant que les deux anciens adversaires ne se fassent confiance.