Le président-directeur général (PDG) du fabricant américain de pneus Titan International, Maurice M. Taylor, et le ministre fran?ais du Redressement productif, Arnaud Montebourg, ont eu, ces derniers jours, un échange de lettres pour le moins musclé, à l'occasion d'une initiative de l'Etat fran?ais visant à empêcher la fermeture par le groupe américain Goodyear d'une usine de pneumatiques à Amiens (nord).
Après une première lettre adressée à M. Montebourg, dans laquelle il déclinait vigoureusement sa proposition de reprendre le dialogue en vue d'une reprise du site d'Amiens-Nord, M. Taylor a réitéré vendredi matin ses critiques virulentes à l'égard du gouvernement fran?ais mais aussi du marché du travail hexagonal.
"Votre lettre du 20 février montre à quel point la classe politique est déconnectée des vrais problèmes du monde", a-t-il estimé dans le courriel qu'il a cette fois-ci envoyé au ministre, faisant référence à la missive diffusée mercredi soir dans les médias fran?ais.
"Vous affirmez que je suis un extrémiste. Je dois avouer que la plupart des hommes d'affaires avisés seraient d'accord pour dire que je suis fou d'avoir eu l'idée de dépenser des millions de dollars pour racheter une usine de pneus en France, et verser certains des salaires les plus élevés au monde", a poursuivi le patron de ce fabricant de pneumatiques pour véhicules agricoles, dans sa rétorque cinglante.
"Votre lettre n'a jamais mentionné pourquoi le gouvernement fran?ais n'était pas intervenu pour sauver l'activité agricole de Goodyear. Votre gouvernement a laissé les barjots du syndicat communiste détruire les emplois les mieux rémunérés (du secteur industriel fran?ais)", a-t-il encore reproché à M. Montebourg et à ses confrères.
En effet, en septembre 2012, après quatre années de négociations, l'opposition de l'une des organisations syndicales fran?aises majeures, la Confédération générale du travail (CGT) à un plan de départs volontaires avait fait capoter le projet de rachat partiel par Titan International de cette usine, dont veut se délester un autre groupe américain, Goodyear.
Par ailleurs, M. Taylor a indiqué, dans cette deuxième lettre, posséder une unité de production en France, plus précisément à Flers, en Normandie (nord-ouest). La première missive du PDG de Titan International, dont le contenu a été révélé mardi par le journal économique fran?ais Les Echos – une "fuite" que M. Taylor attribue directement à M. Montebourg, avait fait un tollé en raison de ses railleries envers les "soi-disant ouvriers" fran?ais qui ne travailleraient que trois heures par jour.
Les syndicalistes de l'usine d'Amiens-Nord ont répondu à ces accusations, en soulignant que ce nombre d'heures travaillées réduit correspond aux consignes données par leurs supérieurs hiérarchiques.
En effet, le site de production tourne actuellement au ralenti, ne fabriquant que 3.000 pneus par jour. "Une fois que ce ticket de production est rempli, on nous demande d'arrêter le travail pour ne pas surproduire", a expliqué un ouvrier contacté par le site d' information des cha?nes publiques fran?aises, francetv.info.
La présidente du Mouvement des entreprises de France ou MEDEF (syndicat patronal fran?ais), Laurence Parisot, a, elle aussi, fait part de son indignation face à la virulence de la lettre de l' entrepreneur américain, la qualifiant d' "inacceptable".
"Par cette fa?on très provocante de dire des choses, (M. Taylor) met en avant des anomalies et des dysfonctionnements (dans le monde du travail) qu'il faut que nous corrigions", a cependant admis la patronne des patrons de l'Hexagone, qui souffre, selon les experts et économistes, d'un manque de compétitivité.