Les positions semblent divergentes entre les partisans du président Alassane Ouattara et ceux de l'ex-président Laurent Gbagbo sur la question de l'organisation d'une concertation nationale baptisée "Etats géné raux de la république".
Lors d'une conférence de presse mercredi à Abidjan, le pré sident du Front populaire ivoirien (FPI, parti de Gbagbo) Pascal Affi N'guessan a insisté sur l'organisation des états généraux de la République, estimant qu'ils viennent au secours du chef de l' Etat Alassane Ouattara qui pourra se " décrocher " de la Cour pé nale internationale (CPI).
"Les Etats généraux de la République, c'est pour préparer les élections, c'est pour avoir du temps. Ce n'est pas le dialogue qui perd le temps mais c'est l'absence du dialogue qui perd le temps ", a déclaré M. Affi.
"Pour ne pas que nous allions encore à des bagarres, nous devons nous asseoir pour discuter", a recommandé en substance M. Affi.
Au cours de la cérémonie de passation des charges avec le pré sident intérimaire du parti, Pascal Affi N'guessan avait déjà invité le chef de l'Etat ivoirien à convoquer les états généraux de la République pour en faire l'instrument opérationnel de la ré conciliation.
Pour le secrétaire général du FPI, Sébastien Dano Djédjé, il s'agit d'un forum qui regroupera "les forces vives de la nation ivoirienne", notamment "les partis politiques, la société civile, les confessions religieuses, les autorités traditionnelles, les organisations socioprofessionnelles, les jeunes, les femmes et les experts".
"Les états-généraux de la République consisteront en un débat large, inclusif, franc et sincère sur toutes les questions qui divisent les ivoiriens depuis plusieurs années, qui constituent les causes de la crise ivoirienne et dont la résolution permettra de fonder un nouveau consensus national pour la paix, la stabilité, l'unité et la réconciliation nationale", a expliqué M. Dano Djédjé.
LE PARTI PRéSIDENTIEL PAS D'ACCORD
Quant au Rassemblement des républicains (RDR), sa réaction se veut plus nette et sans ambages.
Lors de la célébration des 19 ans d'existence de ce parti, son secrétaire général Amadou Soumahoro a martelé que le RDR ne souscrira pas au projet des états généraux de la république envisagé par le FPI.
Plusieurs jours auparavant, le porte-parole du parti pré sidentiel Jo?l Nguessan avait exprimé son opposition à la proposition des pro-Gbagbo relative à l'organisation par les autorités ivoiriennes des états généraux de la République.
"Il n'est pas "nécessaire de multiplier à l'infini les organes de concertation". Les problèmes de la nation ivoirienne sont connus", a estimé M. Nguessan.
Pour Jo?l N'Guessan, les diverses résolutions issues des tribunes organisées depuis plus de 23 ans, aux fins de répondre "au besoin impérieux de restaurer la cohésion de l'unité nationale ébranlée par les tensions sociales et politiques", n'ont pas pu é viter au pays les multiples crises politico-sociales.
"En 2001, pour tenter de trouver une solution à la déchirure sociale en C?te d'Ivoire suite au coup d'Etat de 1999, l'idée du Forum de la réconciliation nationale avait été mise en oeuvre. Ce Forum a vu la participation de toutes les couches sociales et politiques de notre pays. Par ailleurs, il est bon de rappeler que le Forum de la Réconciliation Nationale a été suivi d'une importante rencontre des "Quatre Grands" à Yamoussoukro (centre), notre capitale politique", a-t-il rappelé.
"Tout a été déjà exploré. Tout a été diagnostiqué. Notre pays n'a pas encore besoin d'un second Forum ou des Etats Généraux de la République", a-t-il précisé, estimant que si les résolutions de ces rencontres avaient été appliquées, cela aurait pu éviter à la C?te d'Ivoire la grave crise militaro-politique de 2002.
OUATTARA MONTE AU CRéNEAU
Face à la polémique qui enfle, le président ivoirien Alassane Ouattara est lui-même monté au créneau. A l'issue de sa vaste tournée officielle vendredi dans le centre du pays, M. Ouattara a jugé " inutile" le forum de concertation nationale proposé par le parti de Gbagbo.
Ces états généraux, je ne sais pas à quoi ?a servirait. Ce forum est une perte de temps d' autant plus que les questions à dé battre ont été déjà traitées lors de rencontres antérieures", a dé claré Alassane Ouattara.
Pour celui-ci, les élections présidentielles prochaines auront bien lieu en octobre 2015 et 2015, et il serait plut?t utile pour le FPI de se mettre au travail en vue de ce scrutin présidentiel à venir.
La C?te d'Ivoire tente de retrouver la normalité après une crise post-électorale aigu? qui a secoué le pays en 2010 et 2011, faisant au moins 3 000 morts et un million de déplacés.
La cohésion sociale reste encore fragilisée et les initiatives se multiplient en vue dynamiser le processus de réconciliation qui se présente comme l'un des défis majeurs à relever après la bellig érance.
Pour plusieurs observateurs, la libération début ao?t dernier de 14 personnes pro-Gbagbo détenues dans les prisons du Nord du pays semble tout de même avoir donné de la confiance pour redynamiser ce processus. Ceux-ci se réjouissent de la volonté des deux parties de continuer à se rencontrer, "même si certains poches de désaccords subsistent".