La Somalie est dépourvue d'un gouvernement central fort depuis plus de 20 ans. Si la partie nord de ce pays de la Corne de l'Afrique est relativement paisible, les régions du sud et du centre ont été en proie à l'instabilité.
Des experts ont estimé jeudi que l'exclusion sociale, économique et politique était la cause sous-jacente de cette instabilité.
Le directeur national pour la Somalie de l'organisation Conflict Early Warning Early Response Unit (CEWERU), Osman Moallim, a déclaré à Xinhua à Nairobi que les questions identitaires claniques étaient utilisées pour intensifier ces divergences.
"On a atteint un niveau où la paix durable reste un mirage malgré les nombreuses interventions de la communauté internationale", a déclaré M. Moallim lors de la publication du Rapport d'analyse et de cartographie du conflit en Somalie, à propos des régions sud du pays, élaboré par le CEWERU.
En 2002, l'Autorité intergouvernementale de développement (IGAD) , qui regroupe Djibouti, l'Erythrée, l'Ethiopie, le Kenya, la Somalie, le Soudan et l'Ouganda, a lancé le Mécanisme de prévision et de prévention anticipée des conflits (CEWARN) qui a a pour but de prévenir les conflits dans la région de la Corne de l'Afrique. Le CEWARN collabore avec le CEWERU dans chacun des états partenaires de l'IGAD.
La structure clanique forte de la Somalie a été une source d' unité comme une source de division, observe le rapport.
"Malheureusement, au cours des 21 années écoulées, les clans ont été utilisés pour diviser le pays", a-t-il dit.
M. Moallim, qui est aussi le directeur exécutif du Réseau de développement de la jeunesse somalienne (SYDN), a déclaré que le rêve d'une Somalie unie mettrait longtemps à se réaliser si le système actuel est maintenu.
Le mandat du Gouvernement fédéral de transition de Somalie a pris fin en ao?t 2012, et des élections législatives ont eu lieu en septembre de la même année.
Un an plus tard, le gouvernement central ne contr?le que Mogadiscio, la capitale, tandis que le reste du pays est sous le contr?le des différents clans, a observé M. Moallim.
"Le vide du pouvoir a permis à des gouvernements claniques d'occuper le terrain en fournissant des services sociaux et en collectant l'imp?t", a déclaré M. Moallim.
La population du pays se compose à 70 % d'éleveurs, a-t-il ajouté. "Traditionnellement, ils occupent environ 60 % de la superficie du territoire", a-t-il dit.
Les 30 % restants sont des agriculteurs qui vivent en général le long des cours d'eau.
"Toutefois, il est fréquent que les éleveurs empiètent sur leurs territoires, ce qui cause des conflits", a-t-il dit.
Les tensions sont exacerbées par la forte disponibilité des armes. Les efforts de réconciliation doivent débuter à la base, a indiqué le SYDN.
Le pays est divisé entre ceux qui ont grandi sous le régime de Siad Barré, qui s'est effondré en 1991, et ceux qui ont grandi à l'époque de la guerre civile.
Le gouvernement postérieur à l'indépendance n'a mis en oeuvre que très peu de mesures de développement, a-t-il ajouté. De plus, la manipulation des ressources par les pouvoirs publics a provoqué des griefs à l'encontre du gouvernement de l'époque, a estimé M. Moallim.
"En conséquence, une grande majorité de la population est restée dans la pauvreté. C'est l'origine de la guerre civile qui a renversé le régime de Siad Barré", a-t-il dit.
Ali Ahmed, un chercheur du rapport, a fait remarquer un manque de confiance du nouveau gouvernement somalien de la part des communautés locales, du fait que le pouvoir du gouvernement faisait l'objet d'abus auparavant.
Par ailleurs, la domination de clans par d'autres alimente le conflit dans le sud de la Somalie, a-t-il dit.
"De nouvelles communautés, bien armées, se sont installés dans les régions, ce qui a créé des conflits avec les habitants originaux", a-t-il dit.
Le chercheur a déclaré que l'expansion territoriale des clans a également conduit à des conflits.
Il a dit que les efforts de réconciliation ne sont pas inclusives pour certains clans. "Alors que certaines collectivités ont soutenu l'intervention du gouvernement, certains ont peur de l'engagement du gouvernement à cause des expériences négatives", a déclaré M. Ahmed. Les experts ont noté que les accords de partage du pouvoir ne tiendront seulement si toutes les communautés, en particulier les petites communautés, sont inclus.
"Mais les griefs historiques doivent être résolus avant que les structures de gouvernance locales sont établies", a-t-il dit. L'instabilité a également conduit à des cas d'atrocités sociales dans le sud de la Somalie.
"Les clans dominants ont utilisé leur pouvoir pour commettre le viol, les mariages forcés, et ce ressentiment nourri entre les clans les plus faibles", a déclaré M. Ahmed.
Malheureusement, certains Somaliens considèrent le gouvernement national comme un instrument de l'exploitation des pauvres.
"Ceux qui contr?lent le gouvernement a tendance à accumuler des richesses au détriment des citoyens ordinaires", a-t-il déploré.