M. Pierre Olivier Sur est avocat pénaliste et batonnier de l'Ordre des avocats à la Cour de Paris. Dans un déplacement à Beijing et à Shanghai en compagnie de M. Jacques Bouyssou, membre du Conseil de l'Ordre, ma?tre Pierre Olivier Sur s'est donné pour objectif d'approfondir les échanges avec le milieu judiciaire et avocats chinois.
Dans une conférence de presse organisée le 6 mai 2015 à l'Ambassade de France en Chine, M. Pierre Olivier Sur a d'abord présenté les caractères communs et les différences fondamentales des systèmes judiciaires des deux pays, puis a répondu à certaines questions essentielles en matière d'anti-terrorisme, d'anti-corruption et de coopération juridique.
Quelles rencontres avez-vous prévu au cours de ce voyage ?
M. Pierre Olivier Sur : Nous avons été re?us par le vice-ministre de la Justice. L'Etat de droit, la coopération et l'indépendance de la profession des avocats ont fait partie de notre échange. Nous allons par la suite passer deux jours à Shanghai pour assister à une table ronde.
Fran?ois Hollande vient d'annoncer un budget de 3.8 milliards d'euros pour les actions anti-terrorisme en France. Selon vous, quel est le r?le des avocats fran?ais dans cette mobilisation ?
M. Pierre Olivier Sur : Nous mettons actuellement en ?uvre un dispositif dur pour lutter contre le terrorisme en France, pour permettre par exemple l'écoute téléphonique, mais dans le seul but de lutter contre les terroristes. La position des avocats, c'est de refuser que ces mesures puissent être appliquées au-delà de la nécessité ou de la proportionnalité dont la France se défend contre le terrorisme.
Cette année on a souvent parlé de l'Etat de droit en Chine. D'après vous, quelles doivent être ses priorités ?
M. Pierre Olivier Sur : A l'inverse de l'arbitraire, l'Etat de droit évoque la prévisibilité, c'est-à-dire de prévoir le risque et la procédure à mettre en place. Pour la Chine, cette sécurité juridique n'est pas toujours offerte. Mais c'est bien aujourd'hui de promettre un Etat de droit, ce qui montre qu'on est dans le bon sens. Il faut saluer cette initiative, même si on ne pourra pas tout changer en cinq minutes.
A propos de l'anti-corruption et la différence de nos deux systèmes, quels sont vos solutions quant à la coopération sino-fran?aise ?
M. Pierre Olivier Sur : Le fait que les transactions financières sont de plus en plus complexes et sophistiquées rend la poursuite des actions assez ardue. Mais l'extradition va être rendu plus simple entre la France et la Chine par la signature d'une nouvelle convention très efficace, mais qui se heurte aussi à des difficultés, parce que l'un des principes en matière du droit de l'extradition consiste à une réciprocité au niveau des échelles de peines et garanties de procédure. Une telle convention est jouable à condition de pratiquer d'une manière très proche l'exercice du droit. La signature de cette nouvelle convention prouve que nos deux pays se rapprochent, mais il reste encore beaucoup à faire.
D'autres accords prévus lors de ce voyage en Chine ?
M. Pierre Olivier Sur : Nous avons signé des conventions avec des universités chinoises de droit afin que nos élèves avocats puissent y faire des stages de 6 mois. Nous participons aussi à l'ouverture d'une bibliothèque numérique sur laquelle on mettra tous le savoir sur le droit continental avec des moteurs de recherche très performants.
Vous avez aussi parlé de rencontrer des avocats locaux qui ont été privés de droit de défense. Quelles sont vos préoccupations à ce sujet ?
M. Pierre Olivier Sur : Nous avons rencontré des avocats qui ont évoqué leurs expériences difficiles, comme notamment perdre sa licence, ou être exclu de la salle d'audience. Cela donnait lieu à un récit inquiétant pour l'exercice de la défense par des avocats. La France a aussi connu cette situation et la Chine ne fait pas cas d'exception. Je propose d'être mis à la disposition de nos confrères chinois pour intervenir au cas de besoin, être assis à c?té d'eux dans une audience ou pouvoir leur rendre visite. Une proposition ferme et définitive de ma part.